La Campagne ESSHIH est une campagne de sensibilisation et d’information pour l’autonomisation des jeunes dans le contexte de la migration. Elle vise à fournir des informations fiables et à sensibiliser les jeunes candidats potentiels à la migration irrégulière et leurs familles, ainsi que la société dans son intégralité, sur les réalités de la migration irrégulière, sur les alternatives possibles en Tunisie ou pour migrer à l’étranger par des voies régulières.
En 2020, le nombre de migrants irréguliers arrivés en Italie depuis la Tunisie a été multiplié environ par cinq. Parmi ces arrivées, les ressortissants tunisiens représentaient 87 % du total des arrivées sur les côtes italiennes depuis la Tunisie. Les chiffres révèlent aussi une autre tendance préoccupante, à savoir l’augmentation alarmante des arrivées des enfants tunisiens en Italie par mer durant l'année 2020 : ils ont représenté environ 30 % du total des enfants arrivés en 2020 en Italie, parmi lesquels 78 % étaient non-accompagnés.
Loin d’avoir pour but d’arrêter la migration, la Campagne ESSHIH vise plutôt à parler des réalités qui attendent les candidats à migrer par la voie irrégulière et les invitent à se pencher sur les alternatives en termes de migration régulière ou de développement de projets personnels en Tunisie.
Pour préparer la Campagne, l’Observatoire National de la Migration (ONM) et l'Organisation Internationale pour les Migrations (OIM) ont mené en 2019 et 2020 une étude pour comprendre quels sont les profils des potentiels candidats au départ par la voie irrégulière. Cette étude a permis de déterminer que ce sont surtout les jeunes hommes tunisiens, âgés entre 18 ans et 25 ans qui partent ou envisagent de le faire. Ces jeunes candidats au départ irrégulier ont des profils socio-économiques très variés, allant de jeunes avec un niveau d’éducation secondaire ou un diplôme universitaire et avec un emploi à des jeunes au chômage ayant perdu leur emploi ou qui ne recherchent pas activement d’activité rémunérée. D’autre part, un nombre important de ressortissants des pays de l’Afrique subsaharienne est aussi parti de Tunisie de manière irrégulière en 2020.
La Campagne ESSHIH s’adresse principalement à ces deux groupes de jeunes, ainsi qu’à leurs familles car elles jouent un rôle important dans la prise de décision concernant la « Harga », notamment les mères. Elle vise aussi à atteindre les adolescents, mineurs de 18 ans qui commencent à cultiver un plan de Harga et dans certains cas le réalisent même avant avoir atteint la majorité.
La migration irrégulière est favorisée par des passeurs promouvant le départ irrégulier comme unique moyen de réussite pour les jeunes, notamment sur les réseaux sociaux. Or, les discours des passeurs occultent les conditions réelles dans lesquelles les migrants irréguliers se retrouvent à vivre une fois arrivés dans les pays de destination et tendent à décrire le voyage irrégulier comme un voyage de plaisir au succès certain. La Campagne a pour but de déconstruire les chimères racontées par les passeurs et de parler de la réalité de la migration irrégulière et des alternatives possibles.
Les activités de la campagne :
Dans le contexte de la Campagne les activités suivantes ont été organisées :
- En partenariat avec l’Association Pontes*, la Campagne a soutenu la formation de communicateurs pairs, sélectionnés dans différentes régions du pays, en leur fournissant les compétences et outils pour organiser des actions de sensibilisation, à travers des moyens de communication alternatifs, centrés entre autres sur l’art ou le sport. L’approche « peer-to-peer » de ces actions a permet la prise de contact avec les jeunes en Tunisie, en les écoutant sur leurs projets d’avenir et en débattant avec eux. La Campagne leur a aussi fourni des informations et des messages ciblés, capables de répondre à leurs questionnements et à les accompagner dans l’identification des alternatives possibles à la migration irrégulière.
- L’effort de communication de ces communicateurs pairs a pris, entre autres, la forme d’évènements de sensibilisation organisés dans les différentes régions du pays, à travers des laboratoires artistiques, cinématographiques, des évènements sportifs, des débats ou des festivals, conçus et réalisés par les jeunes eux-mêmes avec l’appui des communicateurs pairs.
La Campagne a été également portée sur les médias grand public, y compris les chaînes de télévision et les radios, qui ont donné de la visibilité aux témoignages de jeunes migrants irréguliers sur les réalités auxquelles ils sont confrontés, ainsi qu’aux histoires de réussite de la jeunesse en Tunisie ou à l’étranger grâce à la migration par voie régulière.
* Association PONTES : une association qui se propose de créer des “ponts” entre les réalités socio-culturelles, de développement et scientifiques au sein du territoire tunisien et entre les deux rives de la méditerranée.